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Lettre de la FNDP #8 : Assurance Vie

Actualités réglementaires

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25/06/2018


ASSURANCE VIE



 Primes manifestement exagérées et traitement liquidatif de la succession

L’arrêt rendu par la Cour de cassation par la première chambre de la Cour de cassation le 28 février 2018 (n°17-13269, non publié au bulletin) ne retient pas l’attention en lui-même, s’agissant d’une cassation pour défaut de réponse à conclusion. En revanche, sa motivation invite incidemment à une réflexion qui n’est sans intérêt en termes de stratégie patrimoniale.


En l’espèce, une personne avait souscrit plusieurs contrats d’assurance sur la vie peu de temps avant sa mort.

L’un des enfants demanda l’intégration dans les opérations liquidatives de la succession de la valeur des contrats d’assurance vie souscrits par le défunt. Sa demande fut rejetée en appel.

Pour la Cour de cassation : « Qu’en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions des consorts X... qui soutenaient que les circonstances dans lesquelles Salvador Y..., âgé de 93 ans et de santé déclinante, avait souscrit ces contrats d’assurance sur la vie dans les derniers mois de sa vie, révélaient la volonté du souscripteur de se dépouiller de manière irrévocable et, partant, induisaient leur requalification en donations rapportables à la succession, la cour d’appel a violé le texte susvisé ».

Il est acquis que l’assurance vie peut être qualifiée de donation indirecte lorsque les circonstances établissent l’absence d’aléa au moment de la souscription des contrats, et le dépouillement actuel et irrévocable du souscripteur, en raison du caractère illusoire de la faculté de rachat.

Il ne fait pas de doute non plus que si le bénéficiaire de la garantie est un enfant, la donation ainsi constatée est rapportable en principe.

Mais, et voici l’objet de notre réflexion, cette qualification s’impose-t-elle également lorsque la réintégration est fondée non pas sur l’absence d’aléa mais sur l’exagération manifeste dans le versement des primes ?

En effet, en choisissant d’affecter un montant important de primes pour une autre cause que la couverture du risque de survie (ce qui démontre l’exagération manifeste dans le versement des primes), et ne désignant pas tous ses enfants par parts égales dans la clause bénéficiaire, le parent n’a-t-il pas exprimé clairement sa volonté de rompre l’égalité entre ses enfants ? Ne serait-il pas alors plus logique d’imputer cette valeur sur la quotité disponible ?

Sans doute l’article 919-1 du Code civil exige-t-il pour que la
donation ne s’impute pas sur la part de réserve du gratifié et,
subsidiairement, sur la quotité disponible, qu’il en soit « autrement convenu dans l’acte de donation ».

Mais, s’agissant d’un vecteur aussi particulier de donation indirecte, est-il raisonnable d’interpréter aussi strictement les dispositions du Code civil ?

Après tout, le souscripteur pouvait penser que les règles du rapport ou de la réduction n’avaient pas à s’appliquer à l’opération qu’il mettait en place.

Il faut donc conseiller à l’auteur de l’opération d’inscrire dans la clause bénéficiaire qu’en cas d’exagération manifeste la valeur des primes exagérées sera traitée comme l’objet d’une donation préciputaire.

Cette précaution est d’autant plus utile, que mal conseillé, le bénéficiaire pourrait taire sa bonne fortune et subir la sanction du recel successoral.

Dans ce cas de figure, il ne perdrait que les droits sur l’indemnité de réduction.




Michel LEROY

Maître de conférences HDR 

Directeur du Master 2 Ingénierie du patrimoine à l’Université de Toulouse.




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